Sahel : le Mali, le Niger et le Burkina Faso rappellent leurs ambassadeurs en Algérie

Les trois dirigeants de l'AES, le malien Assimi Goïta, le nigérien Abdourahamane Tiani et le burkinabé Ibrahim Traoré - © : Wikimedia commons

Les relations entre l’Algérie et ses voisins sahéliens connaissent une nouvelle crise. Après la destruction d’un drone malien par l’armée algérienne, le Mali, soutenu par le Niger et le Burkina Faso, a décidé de rappeler ses ambassadeurs en poste à Alger. Cet incident met en lumière les tensions croissantes dans la région et soulève des questions sur les dynamiques diplomatiques et sécuritaires en Afrique de l’Ouest.

Un incident aérien déclencheur de la crise

Le 1ᵉʳ avril 2025, l’armée algérienne a annoncé avoir abattu un drone de reconnaissance armé qui aurait pénétré son espace aérien près de Tinzaouatine, une localité frontalière avec le Mali. Les autorités algériennes ont justifié cette action en affirmant que l’appareil avait violé leur souveraineté territoriale. De son côté, le gouvernement malien a contesté cette version, affirmant que le drone opérait dans l’espace aérien malien et que sa destruction constituait une « action hostile préméditée » de la part de l’Algérie. Selon Bamako, l’épave du drone a été retrouvée à 9,5 kilomètres au sud de la frontière algérienne, ce qui confirmerait sa présence en territoire malien.

Réactions diplomatiques en chaîne

En réponse à cet incident, le Mali, le Niger et le Burkina Faso, réunis au sein de l’Alliance des États du Sahel (AES), ont annoncé le 6 avril le rappel pour consultations de leurs ambassadeurs respectifs en Algérie. Dans un communiqué commun, ils ont condamné « l’irresponsable acte » de l’Algérie, le qualifiant de violation du droit international et d’atteinte aux relations fraternelles entre les peuples de l’AES et celui de l’Algérie. Par ailleurs, le Mali a convoqué l’ambassadeur algérien à Bamako et a annoncé son retrait immédiat du Comité d’état-major conjoint (CEMOC), une alliance régionale de lutte contre le terrorisme. Bamako envisage également de déposer une plainte devant des instances internationales pour « actes d’agression ».

Contexte de tensions régionales

Cet épisode s’inscrit dans un contexte de relations déjà tendues entre l’Algérie et les pays de l’AES. Depuis les coups d’État militaires au Mali, au Niger et au Burkina Faso, les nouvelles autorités de ces pays ont pris leurs distances avec certaines organisations régionales, notamment la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), pour former leur propre alliance sécuritaire en septembre 2024. L’Algérie, qui s’était positionnée comme médiateur dans les conflits internes maliens, a vu son rôle contesté par ces nouvelles dynamiques. De plus, l’utilisation par le Mali de drones turcs, comme le Bayraktar TB2, et la présence de mercenaires russes du groupe Wagner ont été sources de préoccupations pour Alger, notamment en raison de la proximité de ces opérations avec sa frontière sud. ​

Enjeux sécuritaires et diplomatiques pour l’avenir

L’escalade actuelle des tensions entre l’Algérie et les membres de l’AES soulève des inquiétudes quant à la stabilité régionale. Si les analystes estiment que cette crise diplomatique ne devrait pas dégénérer en conflit ouvert, elle reflète néanmoins les fractures et les recompositions en cours en Afrique de l’Ouest. Les enjeux sécuritaires, notamment la lutte contre les groupes jihadistes, nécessitent une coopération renforcée entre les États de la région. Cependant, les divergences politiques et les rivalités géopolitiques compliquent la mise en place de stratégies communes. Il est donc essentiel pour les parties prenantes de privilégier le dialogue et la diplomatie afin d’éviter une détérioration supplémentaire des relations et de travailler ensemble à la stabilité et au développement de la région.

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