Hydrogène : carburant du futur ?

Hydrogène : carburant du futur ?

Aperçu
L’hydrogène suscite un engouement croissant comme carburant du futur, capable de soutenir la transition énergétique vers une économie décarbonée tout en répondant aux enjeux de mobilité, d’industrie lourde et de stockage d’énergie. Dans un contexte où la demande mondiale passe de 68 Mt en 2019 à 84 Mt en 2024, l’hydrogène se positionne comme un vecteur clé pour l’électrification et la diversification des filières énergétiques. La montée en puissance des filières « vertes », « bleues » ou « grises » illustre la complexité des choix technologiques et environnementaux à l’horizon 2030 et au-delà.

1. Un atout énergétique : l’hydrogène en chiffres

L’hydrogène représente aujourd’hui 2,7 % de la valeur du marché mondial de l’énergie, soit 4,2 milliards de dollars sur 155 milliards en 2022, avec une croissance annuelle moyenne attendue de 9,3 % entre 2023 et 2030. Ces chiffres soulignent l’importance croissante de l’H2 vert produit par électrolyse alimentée en électricité verte issue de solaire et d’énergie renouvelable. Selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), la capacité de production d’hydrogène bas-carbone pourrait être multipliée par 30 d’ici 2030, passant de 0,5 Mt à 15 Mt annuels, grâce à plus de 477 projets en cours dans le monde. En parallèle, la production « grise » demeure majoritaire, avec 99 % de l’hydrogène issu aujourd’hui de sources fossiles, principalement le reformage du gaz naturel. Enfin, l’essor des piles à combustible à hydrogène, technologie clé pour la mobilité hydrogène et le stockage chimique, soutient l’essor de stations-service H2 et de camions à hydrogène.


2. Les filières de production : couleurs et techniques

2.1 Hydrogène gris, bleu et vert

  • Hydrogène gris : produit par vaporeformage du gaz naturel, sans captage de CO₂, son coût unitaire oscille entre 1,50 $ et 2,50 $/kg, mais il subit la pression des mécanismes de tarification carbone.
  • Hydrogène bleu : intègre la capture, utilisation et stockage de carbone (CCUS), avec un coût estimé entre 2,00 $ et 3,50 $/kg [10]. Selon un article de Nature, le hydrogène bleu pourrait réduire jusqu’à 3,4 Mt d’émissions supplémentaires d’ici 2055, selon des scénarios de développement du CCUS.
  • Hydrogène vert : issu d’électrolyse alimentée par de l’électricité verte, il reste cher (3,50–6,00 $/kg), mais bénéficie d’incitations comme le Inflation Reduction Act américain avec des crédits allant jusqu’à 3,00 $/kg. Une étude de Montel Energy prévoit une baisse significative des coûts de production d’ici 2025, grâce à des progrès dans les électrolyseurs et la baisse des prix de l’électricité renouvelable.

2.2 Vers l’hydrogène blanc et autres variantes

L’hydrogène blanc, naturellement présent dans certaines formations géologiques, suscite un intérêt croissant pour des extractions à faible empreinte carbone. Des projets pilotes évaluent la viabilité de cette filière en complément des approches verts et bleus.


3. Applications et technologies : de la pile à combustible aux transports

L’hydrogène trouve des débouchés variés :

  • Mobilité hydrogène : voitures, bus et camions à pile à combustible affichent des autonomies comparables aux véhicules thermiques et un ravitaillement en moins de 10 minutes. En Australie, la première station-service à hydrogène vert de Geelong peut fournir 300 kg en deux heures, soutenant une flotte de poids lourds.
  • Stockage d’énergie : l’hydrogène sert de tampon pour lisser l’intermittence des énergies renouvelables et de vecteur de transport d’énergie sur de longues distances.
  • Industrie lourde : sidérurgie, chimie et raffinage peuvent recourir à l’hydrogène pour remplacer le coke et le gaz naturel, contribuant à la décarbonation des secteurs les plus émetteurs.
  • Production d’électricité via turbines et piles à combustible stationnaires, offrant une solution flexible pour répondre aux pointes de consommation.


4. Défis économiques et environnementaux

4.1 Coûts et financement

L’investissement global dans l’hydrogène bas-carbone devrait dépasser 350 milliards de dollars d’ici 2035, selon l’ArXiv d’Eliseo Curcio sur l’analyse techno-économique. Cependant, la compétitivité de l’hydrogène gris face aux filières décotelées dépendra de la mise en place de prix du carbone supérieurs à 100 $/t CO₂ d’ici 2030. Les crédits d’impôt, subventions gouvernementales et partenariats public-privé sont cruciaux pour réduire le CAPEX et accélérer le déploiement des infrastructures.

4.2 Enjeux environnementaux

Malgré son potentiel de décarbonation, l’hydrogène présente des risques : émissions fugitives de méthane lors de la production grise, impact sur la ressource en eau pour l’électrolyse et empreinte carbone liée au cycle de vie des électrolyseurs. L’Agence internationale de l’énergie insiste sur la nécessité d’un cadre réglementaire robuste pour garantir la durabilité, la sécurité et la transparence des filières.


5. 2035 et au-delà : cap sur une économie hydrogène durable

À l’horizon 2035, l’hydrogène vert pourrait devenir compétitif à un prix de 1 $/kg grâce aux apprentissages technologiques et aux économies d’échelle, comme le prévoit l’initiative Hydrogen Shot du Département de l’Énergie américain. Les réseaux d’hydrogène interconnectés, la compression avancée et la liquéfaction optimisée seront déterminants pour assurer le transport et la distribution.

Les collaborations internationales, notamment en Europe et en Asie, visent la création de corridors dédiés à l’hydrogène, favorisant le commerce transfrontalier. Si les investissements se maintiennent et que les politiques climatiques se renforcent, l’hydrogène pourrait supporter jusqu’à 12 % de la demande énergétique mondiale d’ici 2050.

En somme, malgré des défis techniques et financiers, l’hydrogène conserve toutes ses promesses pour être le carburant du futur, au cœur d’une stratégie globale de transition énergétique, de stockage et de décarbonation.

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