
En ce début juin 2025, le Canada est aux prises avec une saison de feux de forêt d’une ampleur exceptionnelle. Plus de 200 incendies ravagent le pays, dont la moitié sont hors de contrôle, forçant des dizaines de milliers de personnes à évacuer. La fumée dense générée par ces brasiers traverse les frontières, affectant la qualité de l’air dans une grande partie des États-Unis et atteignant même l’Europe. Ce phénomène soulève des préoccupations majeures en matière de santé publique et met en lumière les défis posés par le changement climatique.
Une saison de feux sans précédent
Depuis le début du mois de mai, le Canada fait face à une recrudescence des incendies de forêt, principalement dans les provinces de Manitoba, Saskatchewan et Alberta. Au 3 juin, 205 feux étaient actifs, dont 103 considérés comme « hors de contrôle », selon le Centre interservices des feux de forêt du Canada. Ces incendies ont déjà consumé près de 2 millions d’hectares de forêt, soit environ 4,9 millions d’acres.
Les conditions météorologiques extrêmes, caractérisées par des températures élevées et une sécheresse prolongée, ont favorisé la propagation rapide des flammes. Le professeur Mike Flannigan, expert en incendies de forêt à l’Université Thompson Rivers, souligne que le changement climatique a multiplié par cinq la probabilité de telles conditions dans le centre du Canada.
Les autorités ont émis des ordres d’évacuation obligatoires dans plusieurs régions. Au Manitoba, plus de 17 000 résidents ont été déplacés, une situation qualifiée de « plus grande évacuation de mémoire d’homme » par le Premier ministre Wab Kinew . Des communautés entières, notamment des populations autochtones isolées, ont dû être évacuées par avion en raison de l’inaccessibilité des routes.
Une fumée qui traverse les continents
La fumée générée par ces incendies ne se limite pas aux frontières canadiennes. Portée par les vents, elle a envahi une grande partie des États-Unis, affectant la qualité de l’air dans plus d’un tiers du pays. Des alertes à la qualité de l’air ont été émises dans des États tels que le Minnesota, le Wisconsin, le Michigan, l’Iowa et même jusqu’en Floride.
À Minneapolis, les niveaux de l’indice de qualité de l’air (IQA) ont atteint des valeurs supérieures à 250, qualifiées de « très malsaines ». Le Minnesota a émis sa toute première alerte « maroon », le niveau le plus élevé de l’échelle. Les hôpitaux de la région rapportent une augmentation des consultations pour des problèmes respiratoires.
Plus étonnant encore, la fumée a traversé l’Atlantique pour atteindre l’Europe. Le service européen de surveillance de l’atmosphère, Copernicus, a confirmé que des panaches de fumée provenant des incendies canadiens ont été détectés dans le ciel de l’Europe du Nord-Ouest, notamment en France, au Royaume-Uni et en Scandinavie . Bien que les concentrations de particules fines au sol restent faibles, le phénomène illustre l’ampleur des incendies en cours.
Des impacts sanitaires et environnementaux majeurs
La fumée des feux de forêt contient des particules fines (PM2.5) dangereuses pour la santé humaine. L’exposition prolongée à ces particules peut provoquer des problèmes respiratoires, cardiovasculaires et aggraver des conditions préexistantes telles que l’asthme. Les autorités sanitaires recommandent aux populations vulnérables de limiter leurs activités en extérieur et d’utiliser des purificateurs d’air à l’intérieur.
Sur le plan environnemental, ces incendies libèrent d’énormes quantités de dioxyde de carbone, contribuant au réchauffement climatique. Selon les données de Copernicus, les émissions actuelles sont parmi les plus élevées jamais enregistrées, juste derrière la saison record de 2023 . Cette situation crée un cercle vicieux où le changement climatique favorise les incendies, qui à leur tour exacerbent le réchauffement global.
Les écosystèmes sont également durement touchés. La destruction de vastes zones forestières menace la biodiversité, perturbe les habitats naturels et compromet les moyens de subsistance des communautés dépendantes de la forêt.
Vers une nouvelle normalité climatique ?
La fréquence et l’intensité croissantes des méga feux au Canada soulèvent des questions sur l’adaptation aux nouvelles réalités climatiques. Les experts s’accordent à dire que le pays doit renforcer ses capacités de prévention et de lutte contre les incendies. Cela inclut l’investissement dans des infrastructures de surveillance, la formation de personnel spécialisé et la collaboration internationale.
Le gouvernement canadien a déjà déclaré des niveaux de préparation élevés dans plusieurs provinces, notamment un niveau 5 au Manitoba et en Saskatchewan, indiquant une activité incendiaire extrême et des ressources insuffisantes pour gérer la situation . En réponse, les États-Unis ont déployé 150 pompiers fédéraux pour aider à contenir les incendies.
Au-delà des mesures d’urgence, cette crise souligne l’urgence d’une action climatique globale. La réduction des émissions de gaz à effet de serre, la gestion durable des forêts et la sensibilisation du public sont essentielles pour atténuer les risques futurs.
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